Dans cet épisode de la série sur la technique vocale, nous parlerons de plusieurs effets vocaux qui sortent de l’ordinaire. Ces effets sont en quelques sortes des herbes avec lesquelles vous pouvez aromatiser votre voix. Il peut s’agir de grognements de type growl ou grunt, de crépitements de voix (vocal fry), de distorsions, de hurlements et de cris. Si vous les faites de la bonne manière et en suivant les conseils de professionnels, vous n’abîmerez pas votre voix.

Chanter avec des effets : growl, grunt, distorsion, cris, hurlements...

N’allez pas expérimenter vous-même

Cet article est destiné à vous présenter les différents effets les plus courants et à servir d’ouvrage de référence. Si vous êtes déterminé à vouloir maîtriser ces effets, il faudra solliciter l’aide d’un coach vocal professionnel. La solution à votre problème est généralement assez facile à cerner par un professeur de chant. Faites appel à un professeur de chant qui pourra vous guider, par exemple un professeur de la méthode CVT ou de Vocal Feedback. Se lancer dans des expériences sans l’aide d’un expert est trop risqué pour votre voix (surtout avec certains effets).

Effets

Certains chanteurs appliquent en permanence un certain effet à leur voix, ce qui en fait leur marque de fabrique. Dans cet article, nous en mentionnerons quelques exemples. Ces effets peuvent être associés à un certain style de musique. Par exemple, le death metal est un style de musique caractérisé par des grognements comme le growl. La plupart du temps, vous appliquez un effet dosé et les effets et moments choisis sont un choix artistique du chanteur. En réalité, ils sont indispensables pour rendre votre chant attrayant. Vous pouvez les utiliser pour accentuer le texte que vous chantez. Ainsi, vous vous rapprochez de la manière dont vous utilisez votre voix dans la vie courante lorsque vous racontez quelque chose. L’utilisation des effets ne doit pas être extrême, mais dosée de manière appropriée et intervenir à des moments spécifiques. Réfléchissez-y, faites des expériences, réalisez des enregistrements, écoutez-les et composez un assemblage personnel de ces effets.

Hurlements

En réalité, nous avons déjà consacré un article sur le thème des effets vocaux. Il s’agit de notre article sur le belting et le twang. Le Belting est la technique appropriée si vous voulez chanter fort et aigu. Un élément indispensable du belting est le twang. Il s’agit d’une contraction du muscle ary-épiglottiques. L’épiglotte est une structure cartilagineuse du larynx située au-dessus de vos cordes vocales. Si vous la tirez vers l’arrière, votre canal vocal, appelé aussi tractus vocal ou conduit vocal, agira comme une sorte de mégaphone. Simultanément, la gamme des fréquences entre 4 000 et 5 000 Hertz (c’est-à-dire les aigus) est amplifiée. Le belting est un chant sans compression sur toute la largeur de vos cordes vocales avec un twang maximum. Pour connaître la description détaillée de la technique du belting, nous vous conseillons de lire notre article à ce sujet. Pour résumer simplement la technique du belting consiste juste à crier. Vous pouvez amplifier « l’effet du cri » en ne chantant pas sur toute la largeur de vos cordes vocales, mais seulement sur les bords. Les femmes en particulier peuvent le faire, pour les hommes, c’est plus compliqué. Si les femmes crient vraiment très fort, elles entrent dans le registre dit de flageolet que l’on appelle également voix de sifflet. La chanteuse brésilienne Georgia Brown, qui a une tessiture de huit octaves, en est un exemple parlant.

Chanter avec des effets : growl, grunt, distorsion, cris, hurlements...

Growl

Passons à présent au growl. Ce chant guttural peut être traduit par « grogner ». Les growlers les plus connus sont Tom Waits et Louis Armstrong. Pour être plus précis, Tom Waits combine les techniques du growl et du grunt, mais nous en y reviendrons plus tard. Pour produire le son typique du growl, vous devez faire vibrer vos fausses cordes vocales en même temps que vos vraies cordes vocales. Les fausses cordes vocales sont situées au-dessus des vraies cordes vocales. Il s’agit de deux plis (ou bandes ventriculaires) qui ne peuvent pas se fermer aussi bien que vos vraies cordes vocales. Essayer de fermer vos fausses cordes vocales demande aussi plus d’effort. Si vous voulez sentir où se trouvent vos fausses cordes vocales, faites l’exercice de Kermit la grenouille. Comme vos véritables cordes vocales participent également lors du growl, vous pouvez chanter une mélodie. Le growl s’effectue sans compression. Dans l’un de nos précédents articles, nous avons longuement abordé la question du chant avec et sans compression. Lorsque l’on chante avec compression, ce sont les cordes vocales elles-mêmes qui s’accolent (mode actif). Dans le cas du chant sans compression (mode passif), ce sont les muscles environnants qui rapprochent les cordes vocales les unes des autres, tandis que les cordes vocales elles-mêmes restent détendues. Il est toujours important de savoir si vous chantez avec ou sans compression. Il en va de même lorsque l’on chante en ajoutant un effet.

Grunt

Le growl est très similaire au grunt, cet effet vocal est souvent utilisé dans le death metal. La différence est que le grunt ne fait pas participer vos véritables cordes vocales. C’est pourquoi vous ne pouvez pas chanter une mélodie avec le grunt, car vous ne pouvez pas faire une mélodie avec vos fausses cordes vocales. Le grunt s’effectue donc sans compression, les fausses cordes vocales vibrent et les vraies cordes vocales ne participent pas. C’est en partie pour cette raison que vous ne pouvez pas faire du grunt aigu. Les chanteurs qui veulent aller plus dans les aigus, passent souvent par la distorsion (ou saturation vocale). Le grunt est souvent pratiqué par les hommes. Un exemple bien connu est celui de Karl Willetts, du groupe de death metal Bolt Thrower. Mais les femmes peuvent aussi faire du grunt et alors elles sonnent presque aussi grave que les hommes qui pratiquent le grunt. En effet, les fausses cordes vocales des femmes sont presque aussi grosses que celles des hommes. La différence est moins importante qu’entre les véritables cordes vocales des hommes et des femmes. Un exemple frappant d’une chanteuse qui maîtrise le grunt à merveille est Angela Gossow de Arch Enemy. La technique du vocal fry se rapproche également du grunt. Il s’agit d’une sorte de grunt mais avec plus d’air et de crépitements. Pour vous donner un exemple, écoutez les chansons du groupe The Dillinger Escape Plan.

Distorsion

Un effet courant est la distorsion, ou overdrive ou saturation. Elle est similaire à la distorsion d’une guitare électrique. Il s’agit ici de la surcharge d’un ampli (à lampes). Avec la voix, c’est aussi une sorte de saturation, mais pas parce qu’elle est poussée à son maximum, car ça ne ferait que nuire à votre voix. La distorsion de votre voix est causée par une application trop forte du twang, donc par un rabattement trop important vers l’arrière de l’épiglotte. Votre épiglotte va alors en quelque sorte rebondir. Si vous combinez ça avec la participation de vos fausses cordes vocales (comme dans le growl), vous obtenez une distorsion. Il est également important que le son se forme un peu plus haut dans la gorge qu’habituellement. Votre larynx est également beaucoup plus haut avec une distorsion. Le chant avec distorsion peut être fait avec ou sans compression. Un chanteur comme Kurt Cobain de Nirvana a appliqué une distorsion presque continuellement dans sa voix. Janis Joplin est également un bon exemple.

Chanter avec des effets : growl, grunt, distorsion, cris, hurlements...

Crépitements et bruissements

Chanter avec une voix crépitante est fondamentalement très simple. Vous allez le faire tout seul lorsque vous chantez avec une compression à faible volume. Le chant avec compression a une portée limitée : le contrôle du volume peut aller de 3 à 7. Si vous voulez chanter plus fort que 7 avec une compression, vous allez vous abîmer la voix. Si vous chantez avec une compression inférieure à 3, votre voix va crépiter, ce qui ne causera pas de dégâts. Une telle voix est typique de celle des jeunes actrices américaines. Ce qui peut endommager votre voix, c’est de chanter avec un bruissement dans la voix, c’est-à-dire en ajoutant de l’air à votre voix. Un chanteur comme Sting a des problèmes de voix à cause de cela. Si vous chantez avec une compression et que vous ajoutez du bruissement à votre voix, c’est définitivement dangereux. En principe, c’est possible si vous chantez sans compression, que vous apporter beaucoup de soutien de la respiration et que vous chantez doucement, mais les risques demeurent. Norah Jones et George Michael l’appliquent, mais ils le contrôlent très bien et ils l’alternent. L’important, c’est que c’est plus facile en studio qu’en live, à cause du volume. On peut entendre que James Morrison chante différemment lors de concerts que sur CD : « Je ne recommande vraiment pas de chanter de cette manière avec de la compression », déclare le coach vocal Alfons Verreijt. « Le risque d’abîmer sa voix est tout simplement trop grand. Il en va de même pour le Vocal fry. C’est très dangereux si vous ne savez pas exactement ce que vous faites. Si vous voulez quand même l’apprendre, cherchez un professeur de chant qui sait vraiment comment le faire de manière sérieuse. Car il est certainement possible de le faire de manière non destructrice. » Le dernier effet que nous mentionnons ici est le yodel. Vous l’obtenez en chantant avec et sans compression en alternance rapide. Des exemples bien connus sont Dolores O’Riordan (The Cranberries) et Shakira.

Effets involontaires

Les effets dont nous avons parlé ici sont des effets appliqués délibérément. Il existe aussi des effets non intentionnels. Certains d’entre eux peuvent constituer un risque pour votre voix. Un exemple d’effet non voulu est la distorsion que vous obtenez inévitablement lorsque vous chantez un « ou » aigu avec compression et que vous essayez à tout prix de maintenir ce « ou » avec le plus de justesse possible. Dans l’épisode précédent, nous avons expliqué que certaines voyelles ne peuvent pas être chantées en montant dans les aigus. Si vous voulez chanter un « ou » aigu avec compression, vous devez le laisser tendre vers un « oh ». Si vous ne le faites pas, votre voix se déformera involontairement. Vous pouvez l’entendre lorsque Freddie Mercury chante. Si vous chantez trop fort avec une compression (c’est-à-dire avec un volume au-dessus de 7), votre voix se déformera aussi involontairement. Cela peut paraître intéressant, mais c’est définitivement nuisible pour votre voix. Tout effet non intentionnel est un risque, car vous dépassez les limites de votre voix.

Conditions

Afin de mettre en pratique ces effets de manière responsable, un certain nombre de conditions importantes s’appliquent. Tout d’abord, vous devez avoir une bonne technique de soutien de la respiration. Inspirez le moins d’air possible et mettez en place le soutien de la respiration avant de chanter une phrase. De plus, vous devez savoir maîtriser le chant avec et sans compression dans les moindres détails et avoir une idée de ce qui se passe lorsque vous appliquez ou non une compression. Ne chantez pas à un volume trop élevé. Lorsque vous utilisez un effet, vous perdrez en volume parce qu’ajouter un effet enlève de l’énergie au son de votre voix. Vous pouvez comparer ce phénomène à un vélo où l’on a mis un bout de carton qui touche les rayons. Vous faites beaucoup de bruit, mais à cause de la plus grande résistance, vous roulez plus doucement. Cela se produit également lorsque l’on chante avec un effet. Acceptez de perdre du volume et ne vous forcez pas à en augmenter le volume. Enfin, avec des effets tels que la distorsion et le grunt, il est très important que vous accumuliez beaucoup d’énergie dans votre corps (pas dans votre gorge) avant de produire un son.

Dans cet article, nous nous sommes limités aux effets les plus courants, mais il existe d’autres sortes d’effets encore plus exotiques, comme le chant harmonique et bien d’autres.

Il est probable que vous ayez trouvé qu’il manque un effet important dans cet article, à savoir le vibrato. Mais ne vous inquiétez pas, c’est le sujet du prochain épisode.

Bon à savoir

Restez en dehors de la zone de danger

La pratique du growl, du grunt ou de la distorsion peut provoquer une sensation de sécheresse dans la gorge et une tendance à avaler, ce qui n’est en soi pas dangereux. Vous travaillez avec vos fausses cordes vocales et elles se touchent. Elles n’y sont pas habituées, ce qui donne une sensation de sécheresse. Cette dernière peut également indiquer que vous resserrez vos vraies cordes vocales (en plus de vos fausses cordes vocales) et ce n’est pas le but recherché. Buvez quelques gorgées d’eau et arrêtez-vous pour la journée. En reprenant le lendemain, essayez de garder en tête que vos vraies cordes vocales doivent être détendues. Si vous ressentez un chatouillement dans la gorge et/ou une envie de tousser en utilisant ces effets, c’est que vous entrez dans la zone de danger et vous devez vous arrêter immédiatement. Vous ne vous y prenez pas correctement. Il est possible que ça vienne de votre soutien de la respiration ou encore parce que vous accumulez de la tension au mauvais endroit ou l’effet est mal situé dans votre canal vocal ou que vous chantez avec une compression alors que vous ne devez pas le faire. L’erreur la plus courante lorsqu’on chante avec une distorsion ou un grunt est de chanter avec trop peu d’énergie. Vous pouvez résoudre ce problème en apportant plus de soutien et en agissant au niveau de votre corps.

Les effets et leurs caractéristiques

Dans le tableau ci-dessous, vous pouvez voir les caractéristiques techniques vocales les plus importantes par effet. Il est très important de savoir si un effet est chanté avec ou sans compression. Soyez toujours très attentifs à ce point. Veillez également lorsque vous mettez en place la compression de ne pas essayer d’accoler vos cordes vocales l’une contre l’autre de manière trop prononcée. Lorsque l’on chante avec un effet et avec une compression, la compression doit être aussi détendue que lorsque l’on chante sans effet.

effet compression cordes vocales épiglotte
belting sans compression vraies cordes vocales (sur toute la largeur) rabattue vers l’arrière
cri sans compression vraies cordes vocales (sur toute la largeur ou seulement sur les bords) rabattue vers l’arrière
hurlement sans compression vraies cordes vocales (sur toute la largeur ou seulement sur les bords) rabattue trop loin vers l’arrière
growl sans compression vraies et fausses cordes vocales neutre ou rabattue vers l’arrière
grunt sans compression seulement fausses cordes vocales neutre ou rabattue vers l’arrière
vocal fry sans compression vraies et fausses cordes vocales rabattue trop loin vers l’arrière
distorsion avec et sans compression vraies et fausses cordes vocales rabattue trop loin vers l’arrière
crépitement avec et sans compression vraies cordes vocales neutre
bruissement (ajout d’air)
fortement déconseillé
yodel avec et sans compression en alternance rapide vraies cordes vocales neutre

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